Page:Weil - Attente de Dieu, 1950.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mettre dans les études cette intention seule à l’exclusion de toute autre est la première condition de leur bon usage spirituel. La seconde condition est de s’astreindre rigoureusement à regarder en face, à contempler avec attention, pendant longtemps, chaque exercice scolaire manqué, dans toute la laideur de sa médiocrité, sans se chercher aucune excuse, sans négliger aucune faute ni aucune correction du professeur, et en essayant de remonter à l’origine de chaque faute. La tentation est grande de faire le contraire, de glisser sur l’exercice corrigé, s’il est mauvais, un regard oblique, et de le cacher aussitôt. Presque tous font presque toujours ainsi. Il faut refuser cette tentation. Incidemment et par surcroît, rien n’est plus nécessaire au succès scolaire, car on travaille sans beaucoup progresser, quelque effort que l’on fasse, quand on répugne à accorder son attention aux fautes commises et aux corrections des professeurs.

Surtout la vertu d’humilité, trésor infiniment plus précieux que tout progrès scolaire, peut être acquise ainsi. À cet égard la contemplation de sa propre bêtise est plus utile peut-être même que celle du péché. La conscience du péché donne le sentiment qu’on est mauvais, et un certain orgueil y trouve parfois son compte. Quand on se contraint par violence à fixer le regard des yeux et celui de l’âme sur un exercice scolaire bêtement manqué, on sent avec une évidence irrésistible qu’on est quelque chose de médiocre. Il n’y a pas de connaissance plus désirable. Si l’on parvient à connaître cette vérité avec toute l’âme, on est établi solidement dans la véritable voie.

Si ces deux conditions sont parfaitement bien remplies, les études scolaires sont sans doute un chemin vers la sainteté aussi bon que tout autre.

Pour remplir la seconde il suffit de le vouloir. Il n’en est pas de même de la première. Pour faire vraiment attention, il faut savoir comment s’y prendre.

Le plus souvent on confond avec l’attention une espèce