Page:Webb - Sept pour un secret, 1933.djvu/51

Cette page a été validée par deux contributeurs.
29
sept pour un secret…

Gillian, debout entre eux d’eux, ressemblait à un jeune croissant de lune entre deux des énormes et antiques ifs de la lande.

— Vous êtes en retard, ma sœur, dit Isaïe.

— Vous pouvez le dire, et je crois bien que je peux avoir du retard ! Ce qu’il faut à Jonathan, ce sont deux anges gardiens qui ne le quittent pas, et lui en laisse, n’ayant rien d’autre à faire que de marcher tranquillement à l’ombre de leurs ailes. Dans la haie à droite, et dans la haie à gauche ! Pas une pierre sur laquelle nous ne soyons passés, et, pan, encore dans la haie. Et puis ma malle est tombée, et comment a-t-elle tenu si longtemps, le Seigneur seul le sait, car c’est Jonathan qui l'a attachée. Enfin, quand nous avons été en plein dans la lande, où nous mène-t-il ? Dans un bourbier, naturellement, où nous enfonçons ! Isaïe sourit dans sa barbe. Après tout ils étaient arrivés ; on finissait toujours par là — avec le temps — quand c’était Jonathan qui vous conduisait.

— C’était gelé à la surface.

— Mais non, Isaïe, regardez mes bottines, j’ai dû descendre dans la boue. Il a marché sur mon parapluie, ensuite j’ai laissé tomber mon réticule et il l’a piétiné. La jument ne voulait pas bouger. Alors j’ai dit le Nunc dimittis, (la tante Fanteague appartenait à la Haute Église), et j’ai tapé dessus avec le manche du fouet, et au bout d’un moment nous avons rejoint la route, et les autres incidents ne m’ont pas, à beaucoup près, autant ennuyée. Mais puisque vous ne voulez pas quitter ce maudit endroit, ce qu’il faut, c’est faire conduire la jument par le jeune Rideout. Ça, c’est un homme ! Il ne dit rien, mais les choses se font. St vous m’envoyiez Rideout, votre sœur n’aurait pas son chapeau mis en pièces par les haies et la mèche du fouet, car