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SEPT POUR UN SECRET…

Johnson avait tout découvert et il alla ce matin-là même au Repos de la Sirène, mais n’y vit qu’une écurie désertée, une cassette vide et toutes les traces d’un départ précipité. Ralph et Fringal avaient à jamais disparu. Toute l’histoire fut révélée. Isaïe et Mme Makepeace revinrent, complètement bouleversés. On enterra la pauvre Ailse dans le cimetière. Personne ne voulut plus habiter le Repos de la Sirène : aussi la lande se mit-elle à l’envahir de nouveau et recouvrit de beauté cet endroit lugubre. L’enseigne de la Sirène se balançait au vent en grinçant, et, comme personne ne la repeignait, la dame finit par s’effacer complètement. Mais les enfants qui erraient autour de la demeure silencieuse et abandonnée, sans rien craindre, dans leur innocence, appelaient les boutons d’or « L’argent de la Sirène ». L’histoire s’est assuré une place dans les annales de la région et est devenue semblable à celles que contait Jonathan, et d’autres Jonathan la rediront dans les bars couleur de rose, sous les ombrages tachetés d’arbres en fleur, tandis que les années dérouleront le tapis de pourpre de la lande.

Et un jour d’été, où le perron déserté du Repos de la Sirène est tout bleu de liserons, un petit garçon, aux yeux si foncés, si brillants et pleins de vie qu’on ne peut dire quelle est leur couleur, dit : « Il y a bien longtemps, quand papa était berger, maman a habité ici. » Un autre, plus jeune, aux épaules solides et à l’air impérieux, demande : « Pourquoi n’y habite-t-elle plus ? » — « Oh, père a été la chercher, dit Bob, tu comprends, il la voulait pour lui et pour nous. Il n’était que vacher, notre papa, rien d’autre. »

Mais la fille aînée, qui a les mains pleines de fleurs et qui ressemble à sa mère, s’écrie : « Comment oses-tu