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SEPT POUR UN SECRET…

était, lui, désespérément amoureux de Gillian. Il avait bien entendu le petit ricanement de Fringal et un soupçon s’éveilla de nouveau en lui, soupçon qui le faisait abominablement souffrir parce qu’il avait de l’importance pour Gillian. Il regarda en face, à travers la table, Ralph éclairé en plein par la lampe et lui dit :

— Est-ce que vous admettez qu’on épouse deux femmes, Elmer ?

Pourquoi les yeux de celui-ci se dirigèrent-ils si brusquement sur le visage de Fringal ? Que signifiait cette expression ? Rien, sûrement rien.

— Non, dit Ralph d’une voix forte, non, et, se détournant de Ruth vers Gillian : Quand on est marié, c’est pour de bon.

— Ou pour le mal, intervint tout doucement Fringal avec un semblant de rire.

— Et supposez que vous ayez épousé une femme et qu’après vous vous mettiez à en aimer une autre qui ne vous appartienne pas, quitteriez-vous la première pour vivre avec la seconde ?

— Non, non, dit Elmer précipitamment, avec irritation. Plutôt une souillon à soi qu’une reine à partager.

Le regard de Ruth se détourna de Robert et lança son feu sur Ralph : la différence était celle qui sépare une caresse de l’éclat d’un poignard. L’atmosphère de la pièce était maintenant étrangement chargée d’électricité, comme celle d’une salle avant un match de boxe, et c’était Robert, et non le maître de la maison, qui la dominait.

Il se tourna vers Gillian, la lueur du feu éclaira son visage, montra des marques de pensée, de souci, d’amour. Il y avait de la tendresse dans ses yeux, mais en dessous ils étaient sévères.