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SEPT POUR UN SECRET…

tartes, on mettrait en perce des tonneaux de bière de ménage, les moutons passeraient avec un bruit de feuilles dans la poussière ou dans la boue, les marchandages iraient leur train, les achats se feraient. Mais pour le moment, la foire était terminée. Les boutiques avaient rentré leurs marchandises dans l’intérieur, les chevaux de bois étaient emballés dans leur chariot, la tribu de Johnson était partie pour les montagnes, d’où elle ne reviendrait qu’à l’automne ; la petite vieille à lunettes, moitié enjouée et moitié sévère, s’était pour un an retirée dans le mystère, avec sa vaisselle rayée bleu et blanc. Tout était redevenu semblable à ce qu’il était l’avant veille… seule Gillian Lovekin s’était réveillée à côté de celui dont elle ne voulait pas. Mais quelle importance avait Gillian Lovekin dans l’ensemble des choses ?


Vers le Sud, deux hommes roulaient en voiture à travers la lande et à cette question tous deux auraient pu répondre : « Quelle importance à Gillian ? Elle est tout pour moi ! »

Mais en roulant, le visage renfrogné, ils ne disaient pas un mot. Isaïe fouaillait la jument, et la lande pourprée s’avançait vers eux, les collines lointaines montaient au-devant d’eux et les arbres, l’un après l’autre, bondissaient dans leur direction. Le clocher de la Croix-des-Pleurs vint à eux discrètement, mais très vite.

Robert, assis les bras croisés, sans chapeau, car il l’avait oublié, était heureux de cette allure rapide : il avait beau savoir ce qui les attendait, il se félicitait de le trouver le plus tôt possible. Mieux valait connaître le pire. Il était surtout nécessaire de savoir si la chose était arrivée avec ou sans le consentement de Gillian, parce que, en ce dernier cas, il tuerait Elmer et il préférait le faire pendant qu’il était en colère. Il avait horreur de