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SEPT POUR UN SECRET…

blanches, et on avait l’impression que ces flambeaux formaient le « Comité de Surveillance » de la dame, comité austère et virginal, veillant à ce qu’il ne se passât rien que d’absolument correct dans les chambres à coucher aux meubles d’acajou soigneusement astiqués.

Il n’y avait aucun tapis dans le vestibule, le fumoir ou la salle à manger. À la fin de cette journée de foire, le motif de cette suppression fut évident. Une épaisse couche de paille et de fumier couvrait le plancher exactement comme à l’époque du roi Arthur. Il est manifestement impossible, quand on est dans les affres du marchandage ou qu’on rencontre un rival de l’autre côté de la frontière — car les inimitiés entre voisins des deux versants n’ont nullement disparu — de songer au gratte-pieds et au paillasson. Le champ de foire s’étend derrière l’auberge, la grande rue devant, et à la fin de la journée il n’est pas facile, en ne regardant que le sol, de savoir où l’on est. Le premier service de table d’hôte était commencé, Elmer et Gillian entrèrent donc dans la salle à manger et trouvèrent deux places à un bout de la longue table.

Le menu était plantureux. Des gens comme Isaïe, qui montent à cheval ou circulent en voiture par tous les temps, qui luttent avec de grands animaux, qui ont à entretenir des nerfs et des muscles énormes, avalent une quantité de nourriture. La patronne le savait et ses aloyaux étaient les plus gros, les plus juteux et les plus charnus de la ville. Ses poulets étaient des poids-lourds, toujours par couples, ses tartes engloutissaient les fruits d’un groseillier complet. On ne les avait mis en conserve — avec compétence et selon toutes les règles — que pour ce jour-là — mis en flacons l’année précédente et transformés en tartes la veille, si bien que chaque groseille semblait gonflée