Page:Webb - Sept pour un secret, 1933.djvu/19

Cette page a été validée par deux contributeurs.

village. Et elle-même, on le sent bien, fait partie du même monde. Le cordon ombilical qui joint ses personnages à leur sol l’unit elle-même aux uns et à l’autre. D’où l’extraordinaire puissance, la présence de ses livres. Elle y est à la fois elle-même absente, et comme palpable. Si palpable qu’elle a donné quelque chose d’elle à ses héroïnes. On sait que Mary Webb, qui est morte à trente-six ans, en 1927, était affligée d’un goître. Ce goître n’est pas tout à fait exilé de son œuvre. Ses héroïnes sont laides et elle insiste là-dessus. Prue, l’héroïne de Sarn, est sans beauté. Ambre a une silhouette insignifiante : « Peu importe la forme du visage, dit Mary Webb, à son sujet. Toujours beau lorsque l’esprit jeune excelle et brille au travers. » Et elle ajoute : « Ainsi, le visage d’Ambre, dans ses rares moments, était beau comme le sont peu de visages dans ce monde de pâles émotions. » Et pour ce qui est de Gillian, l’héroïne de Sept pour un secret…, Mary Webb lui accorde de la beauté, mais alors elle lui laisse une cicatrice qui lui marque singulièrement le front. Cette cicatrice, c’est sa propre déchéance physique, dont elle souligne ce visage passionné, car le créateur met toujours quelque chose de son propre individu dans toutes ses créations.

Dans la préface qu’il a écrite en tête de Sarn, M. Jacques de Lacretelle admet qu’il y a souvent une certaine convention dans les romans de Mary Webb : « J’ajouterai même, dit-il, qu’un esprit digne de créer essaye sa force et développe son originalité suivant des modèles reconnus et des sentiments archétypes. Et si l’on ne pense ainsi, il ne reste plus qu’à brûler une