Page:Webb - Sept pour un secret, 1933.djvu/149

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Nous ne le ferons pas devant lui, voilà tout. Faut pas contrarier les anciens. Mais quand nous serons seuls, mon garçon, je vous apprendrai une ou deux petites choses, je ne vous dis que ça. Nous aurons peut-être un piano à La Femme Nue et on fera venir des poulettes.

Il donna une tape dans le dos à Robert et sauta en selle à son tour. Robert, marchant d’un pas machinal, espérait que Gillian resterait longtemps à Silverton. C’était une idée qui ne lui était pas encore venue ; maintenant, il s’y attachait de toutes ses forces. Les étincelles qui luisaient dans les yeux froids d’Elmer en parlant des « poulettes » se communiqueraient en une seconde à ceux de Gillian et allumeraient Dieu sait quel incendie dans son cœur ardent.

« Le Seigneur seul pourrait dire ce qui arrivera s’ils se connaissent, pensait-il. J’aurais bien dû tenir ma langue. Il faudra lui faire un prix si raide qu’il ne puisse pas le payer. »

Et, de façon à moitié consciente, tout en avançant, de son allure disgracieuse de laboureur, sur les fougères odorantes qu’il écrasait, sa main gauche s’enfonça sous la manche de sa veste du dimanche, de sa rude chemise bleue et blanche jusqu’au muscle qui battait docilement, dur et plein comme une balle de cricket, entre sa lourde épaule et son coude couleur d’acajou.

Ainsi, montant le cob à tour de rôle, ils parcoururent rapidement les vingt milles. Quand ils arrivèrent au sommet de la descente qui conduisait au Repos de la Sirène, Robert était à cheval et Elmer le vit se profilant sur le ciel pâle, sans élégance, mais avec une vigueur rassurante. Au-dessous de lui, l’auberge, avec son amas confus de toits, son carré brillant de choux d’hiver d’un vert pâle et la tache bleu foncé du verger, ses