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Arrêté devant la porte de derrière, suivant son habitude quand il avait des chaussures boueuses, il siffla en imitant le merle pour appeler sa mère, qui accourut en toute hâte et prit dans ses bras les deux vilaines petites bêtes.

— Jim, le facteur, est venu, dit-elle, m’annoncer que Mme  Thatcher a passé la nuit dernière.

Là-dessus arriva Jonathan qui, allant au marché, s’était rasé et, par conséquent, coupé. Il se tenait là, le rasoir d’une main, un bout de chiffon sale dans l’autre, faisant songer à un homme qui aurait tenté de se suicider.

— De nouvelles gens, dit-il, de nouveaux voisins. Il va y avoir d’autres habitants à la Sirène maintenant, et ça ne me dit rien de bon. Quand j’aperçois une figure nouvelle, pour moi ça sent les ennuis.

— Moi, je sens que ça brûle, fit Mme  Makepeace en courant à son fourneau.

— Est-ce que ce jambon est cuit, mère ? dit Robert avec un vif intérêt.

— Ah, il a été au feu toute la nuit, mais il faut qu’il refroidisse avant qu’on ne puisse y goûter.

— Nous pourrions bien ne pas vivre assez pour le manger, riposta tristement Jonathan. Voyez ce qui est arrivé à cette pauvre Mme  Thatcher. Nouveaux voisins, nouveaux voisins ! Dieu nous garde !

— Ah, quel pauvre « Dieu nous garde » tu fais, Jonathan, lança sa femme, ôtant la croûte de pâte qui enveloppait le jambon cuit et guettant de l’œil les agneaux, dans la crainte qu’une escarbille brûlante ne les atteignît.

— Vous rappelez-vous l’histoire des nouveaux venus à la Sirène, il y a cent ans ? continua Jonathan imperturbable. Ils ont loué l’auberge en un tournemain. Pas de discussion ni de marchandage pour le prix,