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tante Émilie ne s’en douta pas, parce qu’elle écoutait toujours paupières baissées.

Mme  Fanteague bâilla beaucoup pendant le concert et, sitôt Annie Laurie terminé, s’écria :

— Et maintenant, la lecture.

Ils en étaient au quatrième volume des Œuvres complètes de Crabbe. M.  Gentil lisait d’une voix mielleuse et pendant ce temps Gillian combinait comment elle le rendrait amoureux d’elle. S’il y avait eu là un pâle musicien, quelqu’un, en dehors du pasteur inabordable, elle aurait laissé M.  Gentil tranquille. En ce moment même, si elle le regardait longuement, elle perdait courage. Mais elle décida de faire de lui sa victime.

Crabbe était fini. Gillian alla chercher dans la cuisine le plateau du souper. Le repas terminé, tous les esprits étant échauffés — car, comme disait Émilie, le cacao est très stimulant — ils jouèrent aux petits jeux.

Celui qui avait bien répondu à la question se mettait dans les cheveux une des allumettes en papier qu’Émilie avait faites dans l’après-midi. M.  Gentil posait la sienne derrière son oreille — chose qu’il n’aurait jamais faite avant le cacao. Il en eut pour finir une quantité, « comme toujours », dit avec fierté la tante Émilie. Il était si instruit !

En aidant M.  Gentil à enfiler son pardessus, dans le vestibule modestement éclairé, Gillian lui dit :

— Monsieur Gentil, voulez vous m’emmener sur la Severn ?

Il pensait qu’il pourrait peut-être… un jour.

— Mais sans tante Émilie !

— Sans Émilie ? Il se frotta la tête d’un air perplexe. Sans Émilie ? Que pensera de cela votre tante Fanteague.

— Nous partirons de bonne heure après le petit