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Quand Sir John fut élu, en 1844, pour représenter Kingston dans l’assemblée législative, sous l’Union, il avait vingt-neuf ans. Kingston l’a reçu à bras ouverts à son entrée dans la vie publique, et le jeune député ne connut pas alors les amertumes de la défaite, tandis que Disraeli fut battu trois fois dans la division de High Wycombe et rejeté une fois par les « libres et indépendants » électeurs de Taunton avant que Maidstone lui ouvrît les portes du parlement anglais.

De 1847 à 1876, — une période de 29 ans, — Disraeli représenta le comté de Buckingham, de fait jusqu’à son élévation à la pairie. De 1844 à 1878, — une période de cinq ans plus longue, — Sir John Macdonald siégea en parlement pour la ville de Kingston. Disraeli servit douze années avant de devenir ministre de la Couronne, tandis que Sir John fut nommé receveur-général dans le cabinet Draper-Daly après deux années et demie à peine d’expérience législative. Lord Beaconsfield commença sa carrière comme radical, mais Sir John est resté toute sa vie un franc conservateur. Écossais de naissance, ce dernier s’est toujours montré absolument loyal et dévoué au Canada ; Beaconsfield, descendant des Juifs, a été plus Anglais que les Anglais eux-mêmes, ce qui n’empêcha pas, un jour, un adversaire aussi libéral que M. Gladstone de lui reprocher de n’avoir pas une goutte de sang anglais dans les veines.

La ressemblance la plus accentuée entre Beaconsfield et Sir John existe dans le culte constant que tous deux ont pratiqué pour un opportunisme éclairé. Grâce à cet opportunisme, Sir John a remporté quelques-uns de ses plus beaux triomphes, et nous lui devons de dire que sa politique, bien que parfois apparemment inconséquente avec son passé, n’a jamais été inconsistante avec l’intérêt national. Nul homme, dans quelque contrée du monde, n’a compris plus intelligemment les courants populaires que notre premier ministre. Il a prescrit les directions à suivre pour le bien public aux heures les plus critiques, pratiquant tantôt l’homéopathie, tantôt l’allopathie. Complétons notre pensée par l’expressive comparaison de Hare, si singulièrement caractéristique de la conduite politique de Sir John : « Un homme d’État, me dit-on, devrait suivre l’opinion publique. Sans doute, — mais comme un cocher suit ses chevaux, en tenant la main ferme et en les dirigeant. »