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l’Anne, qui étoit l’autre Navire d’avitaillement. Le lendemain, notre Commandant fît donner aux Vaisseaux le signal de faire quérir à bord de l’Industrie leur portion d’Eau de vie. On employa à cet ouvrage les Chaloupes de l’Escadre, durant les trois jours suivans, à compter depuis le 19 du mois vers le soir. Quand le Navire d’avitaillement fut déchargé, il nous quitta, et prit la route des Barbades, où il devoit être chargé pour l’Angleterre, La plupart des Officiers de l’Escadre profitèrent de cette occasion pour écrire aux Amis qu’ils avoient laissés dans leur patrie ; mais nous sçumes dans la suite que le Navire avoit eu le malheur d’être pris par les Espagnols. Le 20 de Novembre les Capitaines de l’Escadre représentèrent au Commandant, qu’ils avoient plusieurs malades à bord, et que non seulement eux, mais aussi les Chirurgiens, étoient d’avis qu’il falloit laisser entrer plus d’air entre les ponts ; mais que leurs Vaisseaux tiroient trop d’eau, pour qu’il y eût moyen d’ouvrir les sabords d’en bas. Mr. Anson, convaincu de l’importance de l’avis, ordonna qu’on fît six ouvertures à chaque Vaisseau dans les endroits où la chose pourroit se pratiquer avec le moins d’inconvéniens.

Je ne saurois m’empêcher d’observer ici, combien tous ceux qui, en vertu de leur charge ou de leur autorité, ont quelque influence sur les affaires de notre Marine, sont obligés de prendre garde à un article aussi important, que l’est la conservation de la vie et de la santé de nos Gens de Mer. Si l’on pouvoit supposer, que les motifs d’humanité fussent impuissans en cette occasion, les raisons d’État, et le désir de voir prospérer nos armes, aussi bien que l’intérêt et l’honneur de chaque Commandant de Vaisseau en particulier, devroient nous animer à examiner avec soin tous les moyens qu’on propose, avec quelque apparence de probabilité, pour contribuer à la santé des Equipages. Mais ce soin est-il ordinaire ? Les méthodes, inventées depuis peu, pour purifier et rafraichir sans peine l’air de nos Vaisseaux, ont-elles été examinées avec cet esprit de sincérité et d’impartialité, que les avantages, qu’on pouvoit se promettre de ces méthodes, auroient dû naturellement inspirer ? Ne les a-t-on pas souvent au contraire négligées, ou même rejettées d’un air de mépris ? Je dis plus, quelque-uns de ceux, qui ont eu la commission d’en faire l’essai ne se sont-ils pas rendus coupable d’une partialité impardonnable dans le rapport des expériences faites à cet égard ? Il faut cependant avouer, que plusieurs personnes de distinction qui ont eu le commandement de nos Flottes, ou la direction de ce qui les concerne, ont apporté à cet