Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/414

Cette page n’a pas encore été corrigée

de jours : leur but étoit de faire leur profit de tous les corps de ces Animaux qu’on jetteroit à la Mer. En effet, les deux tiers des Cochons moururent, avant qu’on eût perdu la terre de vues et plusieurs Bateaux Chinoissuivirent le Vaisseau, pour en repêcher les Charognes. Qu’on juge par ces échantillons du mérite d’une Nation, qu’on vient nous citer à l’autre bout du monde, en exemple de toutes vertus. Mais revenons à notre sujet.

Vers la fin de Septembre, comme je l’ai dit ci-devant, le Commandeur voyant que ceux qui avoient entrepris la livrance de tout ce dont il avoit besoin pour son voyage, le trompoient, et que le Viceroi paroissoit l’avoir oublié, jugea qu’il ne sortiroit d’embaras, qu’en allant lui-même à Canton et en rendant visite au Viceroi. Dans cette vue, il envoya un Message, le 27 de Septembre, au Mandarin, qui avoit inspection sur tout ce qui concernoit le Centurion, pour l’informer qu’il avoit résolu de partir le 1 d’Octobre, dans sa Chaloupe pour Canton ; il ajouta, que le lendemain de son arrivée, il la feroit notifier au Viceroi, et le prieroit de fixer le tems de son audience. Le Mandarin pour toute réponse, dit qu’il feroit savoir au Viceroi les intentions du Commandeur. Cependant on faisoit les préparatifs nécessaires pour ce voyage. L’Equipage de la Chaloupe, au nombre de dix-huit hommes sans compter le Maître Nocher, fut mis en uniforme, tels que sont les Rameurs des Barges de la Tamise. Ils avoient des Habits écarlate, et des Camisoles d’étoffe de Soie bleue, le tout garni de boutons d’argent, et les armes du Commandeur, en argent, sur l’Habit et sur le Bonnet. Il y avoit lieu de craindre et même bien des Gens l’avoient assuré, que la Régence de Canton prétendroit exiger le payement des Droits de l’Empereur, pour le Centurion et pour sa Prise, et qu’on n’y accrocheroit la permission de fournir les Provisions nécessaires à nos Gens pour leur voyage. Le Commandeur étoit bien résolu de ne jamais se soumettre à un exemple, d’une conséquence si honteuse pour les Vaisseaux de Sa Majesté, et il prit ses précautions pour que les Chinois ne pussent tirer aucun avantage de ce qu’ils alloient l’avoir en leur pouvoir. Pour cet effet, il nomma Mr. Brett, son premier Lieutenant, pour être Capitaine du Centurion sous lui, et lui donna ses instructions. Suivant ces ordres, Mr. Brett devoit, en cas qu’on retint Mr. Anson à Canton, pour le sujet de ces Droits, retirer les hommes qui étoient à bord de la Prise, et la détruire ; ensuite descendre la Rivière, avec le Centurion, au-dessous de Bocca Tigris, et s’arrêter