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mentés par un autre avantage sans prix, qui est, que les vents frais, qui y souflent presque continuellement, et les pluies, qui y tombent de tems en tems, quoique rarement, et pas longtems, sont apparemment cause, que l’air y est admirablement sain. J’en dois porter ce jugement, puisqu’il contribua si puissamment à faire recouvrer la santé à nos Malades, et qu’il nous donna à tous un appétit dévorant. Ce dernier effet fut si visible, que quelques-uns de nos Officiers, qui avoient toujours été petits mangeurs, ne faisant, après un léger déjeuné qu’un seul repas médiocre par jour, devinrent ici des gloutons ; car au-lieu d’un bon repas, il leur en falloit au moins trois, tels qu’un seul auroit suffi autrefois pour leur charger l’estomac : mais si l’appétit étoit grand, la digestion se faisoit aussi à merveille ; car après avoir déjeuné d’un bon morceau de Bœuf, suivant un usage établi par nous-mêmes dans l’Ile, nous attendions bientôt après avec impatience l’heure du diner.

J’aurois pu m’étendre davantage sur les louanges de ce charmant séjour ; mais il est juste aussi de dire un mot des desagrémens qu’on y rencontre.

Premièrement, à l’égard de l’eau, j’avoue, qu’avant que d’avoir été convaincu du contraire par l’expérience je n’aurois jamais cru que le manque d’eau courante puisse être aussi parfaitement réparé qu’il l’est dans cette Ile par des Puits et des Sources, qu’on trouve par-tout assez près de la surface de la terre, et dont l’eau est fort bonne. Au milieu de l’Ile il y a deux ou trois grandes pièces d’excellente eau, dont les bords font aussi réguliers et aussi unis, que si l’on avoit voulu en faire des Bassins pour l’ornement du lieu. Il est sûr néanmoins, que relativement à la beauté des vues, le manque de Ruisseaux et d’eaux courantes en un défaut, dont on n’est que très imparfaitement dédommagé par de grandes pièces d’eau dormante, ou par le voisinage de la Mer, quoique ce dernier article, eu égard à la petitesse de l’Ile, suppose presque par-tout un coup d’œil fort étendu.

La plus grande incommodité qu’on éprouve dans Tinian est causée par une infinité de Cousins et d’autres sortes de Moucherons, comme aussi par des Tiques : car quoique cet insecte s’attache ordinairement au Bétail, nous ne laissames pas d’en être attaqués assez souvent ; et quand cela arrivoit, pour peu qu’on tardât à ôter la Tique, elle cachoit sa tête sous l’épiderme, et causoit une douloureuse inflammation. Nous y trouvames aussi des Mille-pieds et des Scorpions, que nous crumes veni-