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mes entre autres des Maqueraux, des Brêmes, des Fiddle-fish, des Mulets, des Solles, et des Hommars. C’est le seul endroit, où nous ayons péché des Torpilles ; la figure de ce Poisson ressemble beaucoup à celle du Fiddle-fish : on ne peut guère l’en distinguer que par une tache ronde et brune, de la grandeur d’un écu, que la première espèce de ces Poissons, a au milieu du dos. Peut-être qu’on m’entendra mieux si je dis que la Torpille est un Poisson plat, qui ressemble beaucoup à la Raye. C’est un Poisson des plus singuliers et qui produit sur le Corps humain d’étranges effets. Pour peu qu’on le touche, ou si par hazard on vient à marcher dessus, on se sent saisi d’un engourdissement par tout le corps ; mais sur-tout dans la partie qui a touché immédiatement la Torpille. On remarque le même effet quand on touche ce Poisson, avec quelque chose qu’on tient à la main : j’ai moi-même ressenti un assez grand engourdissement dans le bras droit, pour avoir appuyé pendant quelque tems, ma canne sur le corps de ce Poisson ; et je ne doute pas que l’effet n’en eût été plus violent, si l’Animal n’avoit déja été prêt d’expirer : car il produit cet effet à mesure qu’il est plus vigoureux, et il cesse d’en produire dès qu’il est mort. On peut en manger sans aucun inconvénient. J’ajouterai encore que l’engourdissement ne passe pas aussi vite, que certains Naturalises le disent ; le mien diminua insensiblement, et le lendemain j’en sentois encore quelques restes.

Nous commençames ici à ne plus voir de Tortues, cependant nos Chaloupes qu’on envoyoit en Sentinelle, devant la Baye de Petaplan en prenoient et nous en envoyoient souvent ; et quoique ce fût la seule viande fraiche, que nous eussions goûtée, depuis six mois, nous n’en étions nullement dégoûtés, et nous les trouvions aussi bonnes que le prémier jour.

Les Animaux que la Terre nous fournissoit étoient principalement des Lézards, qu’on y trouve en grand nombre, et que bien des gens mangent avec plaisir. Nous n’y vimes point d’autre Animal carnassier que le Crocodile ou Alligator, et encore étoient-ils assez petits. Quoique nous n’y vissions pas de Tigres, il y en a pourtant en grand nombre, tous les matins, nous en appercevions des traces, sur le sable autour du Ruisseau, où nous faisions de l’eau : nous n’en avions aucune crainte, car nous savions qu’ils ne sont pas ici dangereux, comme dans l’Asie et dans l’Afrique, et n’attaquent presque jamais les Hommes. Pour des Oiseaux, il y en a assez : nous y trouvames des Phaisans en grande abondance et de plusieurs espèces ; mais la chair en est sèche et sans goût, il y a aussi une