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quelqu’un qui veut se transporter dans des Païs éloignés, pour son instruction, ou pour celle des autres, néglige un moyen aussi nécessaire. J’ajouterai, pour donner un nouveau degré de force à cet argument, qu’outre les usages du Dessein, déjà indiqués, il y en a un, qui, quoique moins frappant, est peut-être plus important que tous les autres ; savoir que ceux qui sont accoutumés à dessimer des objets, les voyent bien plus distinctement que d’autres, qui n’ont pas la même habitude. Car c’est une chose connue par expérience, qu’après avoir envisagé un objet, même assez simple, notre attention ou notre mémoire sont rarement assez fortes pour nous représenter exactement les différentes parties de l’objet ; puisque, tout bien examiné, il se trouvera que, nous nous sommes trompés à l’égard de quelques parties, et qu’il y en a d’autres que nous n’avions absolument point apperçues : au-lieu que celui, qui contracte l’habitude de dessiner ce qu’il voit, apprend aussi à rectifier cette inattention. En comparant ses idées copiées sur le papier avec l’objet qu’il veut représenter, il remarque en quoi il a été trompé par l’apparence, et aquiert avec le tems la faculté de voir des parties, qui lui auroient échappé auparavant, et de mieux conserver l’idée de ce qu’il apperçoit qu’il ne lui aurait jamais été роssiblе, sans les progrès qu’il a faits dans le Dessein.

Ces réflexions, qui méritent incontestablement l’attention de tous les Voyageurs, conviennent d’une façon encore plus particulière aux Officiers de Marine ; puisque, faute d’entendre l’art de dessiner et de lever des Plans, il n’y a plus de Cartes ni de vues de terre à avoir, ni, par cela même, presque plus de Navigation. C’est sans doute, en considération de toutes ces utilités, que Sa Majesté a établi un Maître de Dessein à Portsmouth, pour l’instruction de ceux qui sont destinés à remplir les différens postes de la Marine. Il ne manque pas de Gens prévenus de l’idée, qu’un bon homme de Mer doit être aussi rude et ausi intraitable