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Égalité des conditions ! Qu’aviez-vous besoin, pour en venir là, d’invoquer sottement l’équivalence des produits, l’identité des valeurs ? Mais ce n’est pas tout ; et si vous constatez en même temps qu’un certain nombre de citoyens restent en arrière parce qu’ils n’ont pas voulu ou pas su tirer parti de leurs moyens, vous consacrez implicitement le principe de la justice distributive, et les droits de l’inégalité. Inégalité des positions ! Touchez-là : nous sommes d’accord !

Je crois, par exemple, que vous avez tort si vous pensez que ce n’est pas en vertu de cette inégalité, singulièrement exagérée d’ailleurs, que la société se soutient, mais que c’est malgré cette inégalité. Il ne serait pas difficile, je crois, de prouver à posteriori que l’inégalité des positions est favorable au maintien de la société. A priori, c’est encore plus aisé : si cette inégalité, exagérée ou non, a sa source dans un fait naturel, comme cela est, il ne peut y avoir que tout profit pour la société à lui faire sa part. Je ne veux plus d’antinomies.

Il y a cependant une remarque à faire tout en faveur de M. Proudhon, et que je fais avec plaisir. Je pense, en effet, que cette inégalité, dans la société telle qu’elle est aujourd’hui constituée, est exagérée, La cause de cette exagération est évidente : elle gît dans ce fait que nous n’avons pas encore conquis l’égalité des conditions. Au jeu de la course sociale, les concurrents, au début, ne sont pas en ligne, ce qui donne aux uns une avance, aux autres un retard considérables. Tous les citoyens, en entrant dans la