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Quel déplorable esprit de sophistique ! Le moi, seul dépositaire de la liberté, de la justice et du respect, froissé, amoindri dans sa dignité parce que la nature extérieure et fatale ne le respecte pas, ne lui rend pas justice pour justice ! Une force s’indignant de ce qu’on lui fournit un point d’appui résistant ! La vapeur et le piston ne se faisant pas équilibre ! Et pour ne laisser au moi vis-à-vis de la fatalité extérieure que le choix entre la domination et la servitude, pour faire de l’homme le régisseur de la nature sinon son esclave et sa victime, fallait-il ignorer et dénaturer l’admirable formule de Bacon : L’homme ne commande à la nature qu’en lui obéissant ?

Ceci établi, le problème de l’accord entre la Justice et l’économie se pose en ces termes, je reprends l’exemple cité plus haut de la division du travail :

Étant donnée une société où le travail est divisé, on demande qui subira les inconvénients de cette division.

À mon tour, je demande à M. Proudhon : ― Étant donnée une société où le travail est divisé, et la division du travail ayant plus d’avantages que d’inconvénients, ou, pour mieux dire, la division du travail n’ayant que des avantages et point d’inconvénient, on demande qui profitera des avantages de cette division.

Nous voilà bien avancés ! Et il importait bien de mettre le feu aux antinomies pour ne pas éclairer, pour ne pas même poser la question. Non, la question n’est point posée, je ne l’accepte pas dans ces termes. Et tant qu’il me restera un souffle de voix, je crierai à M. Proudhon : ― Je n’admets point que la division