Page:Walras - L’Économie politique et la justice.djvu/24

Cette page a été validée par deux contributeurs.
24
L’ÉCONOMIE POLITIQUE

Généralisant aussitôt l’observation de Rossi, je n’eus pas de peine à me convaincre que ce qu’il avait dit de la division du travail, de l’emploi des enfants dans les manufactures, des industries insalubres, on pouvait et l’on devait le dire de la concurrence, du prêt à intérêt ou crédit, de la propriété, du gouvernement, en un mot de toutes les catégories économiques et par suite de toutes les institutions sociales.

Je réponds :

5o Que la propriété et le gouvernement ne sont pas à proprement parler des catégories économiques. Ce sont bien des catégories morales ;

6o Que la concurrence, le prêt à intérêt ou crédit ne sont pas plus coupables que la division du travail.

Je soutiendrai ces objections tout à l’heure. Pour le moment, je vois M. Proudhon rouler sur une pente fatale, et je ne veux pas l’arrêter dans sa course. Où pourra-t-il en arriver avec de pareilles prémisses ?

Les deux phénomènes (de l’augmentation de la richesse et de l’abrutissement de l’ouvrier par la division du travail) sont aussi certains l’un que l’autre, intimement liés, à telle enseigne que, si l’industrie devait se soumettre à la loi du respect personnel, elle devrait, ce semble, abandonner ses créations, ce qui ramènerait la société à la misère…

Voilà qui est dit. Suivant M. Proudhon, si l’industrie se soumet à la loi du respect personnel, si la production se fait scrupule de violer la justice, nous tombons dans la misère. Telle est l’opinion de M. Proudhon. Mais la question se complique singulièrement ; car d’autre part les économistes, c’est M. Proudhon qui l’avoue,

…Les économistes démontrent que la Justice est elle-même une puissance économique, que partout où la Justice est