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sure de la valeur dans la rareté des choses utiles.

Repousser cette répartition pour n’admettre que la seconde, c’est ne reconnaître comme élément de la richesse que le travail ; c’est voir l’origine de la valeur dans le travail, c’est mettre la mesure de la valeur dans les frais de production. Or, il y a dans cette doctrine une pétition de principe qu’on a signalée depuis longtemps et qui ne sera jamais évitée.

« Que la valeur des produits soit due aux frais de production, je le veux bien. Mais d’où viennent les frais de production ? L’idée de la valeur est dans l’idée de frais. Car qu’est-ce que les frais d’un produit, si ce n’est ce qu’on a payé, ou la valeur qu’on a donnée, pour avoir ce produit ? On n’a donc pas tout dit, en avançant que la valeur vient des frais de production. Cela revient à dire que la va leur des produits vient de la valeur du travail. Mais la valeur du travail, d’où vient-elle donc ? Pourquoi le travail a-t-il une valeur ? Telle est la question que Ricardo n’a pas résolue, qu’il n’a pas même posée, qui n’en existe pas moins, malgré sa négligence, et qu’on ne résoudra jamais qu’à l’aide de la rareté. Et, en effet, si le travail a de la valeur, c’est parce qu’il est rare ; et si les produits valent quelque chose, c’est parce qu’ils représentent la valeur et la rareté du travail qui les a produits[1]. »

Si l’on se rend a la force de cet argument, si l’on adopte la théorie de la valeur d’échange la plus philo-

  1. M. Walras, De la nature de la richesse et de Vorigine de la valeur, p. 185.