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L’ÉCONOMIE POLITIQUE

dit-il, avec J.-B. Say trois grandes phases dans le rôle de la Richesse, à la création de laquelle tout le monde concourt, et dont chacun doit avoir une part équitable. Elle est d’abord Produite, ensuite Distribuée dans la société, et finalement Consommée, c’est-à-dire utilisée ou employée. »

Il m’est impossible d’admettre cela, même avec J.-B. Say. D’abord, Monsieur Garnier, je vous affirme que tout le monde ne concourt pas à la création de la richesse. Il y a, croyez-moi, des gens qui se contentent parfaitement du rôle de consommateur sans envier celui de producteur. Mais ce n’est rien encore ; et l’erreur est bien plus grave.

Il y a des richesses à la création desquelles personne ne concourt : c’est à savoir les richesses naturelles. Entre toutes les choses si diverses et si nombreuses qui ont de la valeur, les unes nous sont données par la nature sans le secours du travail de l’homme ; les autres sont le fruit du travail, ou de l’application du travail de nos facultés aux dons gratuits de la nature. Il y a donc une richesse naturelle et une richesse produite. En énonçant comme l’ont fait Adam Smith, Ricardo, J.-B. Say et M. Garnier, d’une façon générale, que la richesse est d’abord produite, puis distribuée, etc., on semble chasser du domaine de la science toute une catégorie de valeurs des plus importantes ; car elles sont précisément l’objet le plus direct de la théorie de la valeur et de la théorie de la propriété : je parle des richesses naturelles. M. Garnier veut-il que je lui cite un premier exemple de richesse natu-