Page:Walras - L’Économie politique et la justice.djvu/13

Cette page a été validée par deux contributeurs.
13
ET LA JUSTICE.

moraux en ce que les premiers auront leur origine dans la fatalité des forces naturelles, les seconds dans la volonté libre de l’homme. Il est une troisième catégorie de faits, les faits historiques, qui s’accomplissent au sein de l’humanité exactement comme les faits naturels au sein de la nature, et qui sont empreints, comme les faits naturels, d’un caractère fatal, ou, si l’on veut, providentiel. Le fait naturel et le fait historique se distinguent autrement : le premier est toujours identique à lui-même, le second est varié et progressif. Cela posé, il est aisé de se convaincre :

1o Que le fait de la valeur d’échange est un fait naturel et fatal ; car, s’il se produit en partie par suite de la présence de l’homme sur la terre ; il se produit surtout par suite de la limitation en quantité des choses utiles, et doit être considéré comme aussi indépendant de notre liberté psychologique que le sont aussi les faits de la pesanteur, de la végétation, etc. ;

2o Que le fait de la propriété est un fait moral et libre ; car s’il se produit en partie, en tant que fait de l’appropriation, par suite de la limitation en quantité des choses utiles, il se produit surtout, en tant que fait de la propriété, comme caractère moral de l’appropriation, en considération de la double qualité de moralité ou d’immoralité dont l’appropriation peut être revêtue ou entachée.

Ainsi donc au seuil de l’étude de la richesse sociale, et derrière le phénomène de l’échange, se présentent à nous deux théories de deux faits généraux distincts, deux sciences bien caractérisées : la science naturelle