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DE LA TENDANCE DES VARIÉTÉS À S’ÉCARTER


Que les variétés perfectionnées arriveront avec le temps à extirper l’espèce mère.


La variété aurait dans ce cas remplacé l’espèce dont elle serait une forme plus parfaite, plus élevée dans l’échelle des organismes, plus apte à se protéger et à prolonger la race. Une variété semblable ne pourrait pas retourner à la forme primitive ; car celle-ci, lui étant inférieure, ne lui ferait jamais concurrence dans la lutte pour l’existence. En accordant même qu’il existe une « tendance » à reproduire le type de l’espèce, la variété doit demeurer prépondérante, et survivre seule sous des conditions défavorables. Elle donnera elle-même naissance à d’autres, ayant des formes diversement modifiées, et qui, d’après la loi énoncée plus haut, tendront à prédominer. Les lois générales qui régissent l’existence des animaux à l’état de nature, nous montrent donc une progression, et une divergence continue. Nous ne prétendons pas cependant que ce résultat soit invariable.

On peut supposer que, dans des conditions physiques modifiées, la race la mieux adaptée au premier état de choses, puisse devenir incapable de soutenir la lutte pour l’existence et s’éteindre, tandis que l’espèce mère et ses premières variétés, quoique inférieures, continueraient à prospérer. Il peut aussi survenir des variations de peu d’importance, ou n’affectant pas les organes ou les facultés nécessaires à la conservation, de sorte que ces variétés-là peuvent vivre à côté des espèces mères, tantôt donnant naissance à des variétés nouvelles, tantôt