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RÉPONSE AUX OBJECTIONS

préhistorique était trop parfait pour l’usage qu’il en pouvait faire.

À la fin, M. Claparède essaye de m’enfermer dans le dilemme suivant : « Ou bien M. Wallace a eu raison de faire intervenir une Force supérieure pour expliquer la formation des races humaines et guider l’homme dans la voie de la civilisation, et alors il a eu tort de ne pas faire agir cette même Force pour produire toutes les autres races et espèces animales et végétales ; ou bien il a eu raison d’expliquer la formation des espèces végétales et animales par la seule voie de la sélection naturelle, et alors il a eu tort de recourir à l’intervention d’une Force supérieure pour rendre compte de la formation des races humaines. »

Ce raisonnement, au lieu d’être logique, me parait être une pétition de principe. Il suppose que l’homme ne présente aucun phénomène différent de ceux que nous observons chez les animaux ; or j’ai exposé des faits qui prouvent le contraire, et que M. Claparède n’a ni réfutés ni contestés. Mon raisonnement est tout entier basé sur des faits certains : mon adversaire admet ces faits, et ne réfute pas les déductions que j’en tire, et cependant il affirme que ma conclusion est inadmissible, parce que la théorie de la sélection naturelle doit, ou bien expliquer tous les phénomènes du monde organique, ou bien n’en expliquer aucun ! Mais je demanderai pourquoi on exigerait cela de cette théorie. M. Darwin lui-même ne réclame pas pour elle cette universalité ; le fait important d’une origine commune aux animaux et aux plantes, n’a même selon lui d’autre base que l’analogie, et il ajoute qu’il est indifférent de l’accepter ou de le rejeter (Origine des espèces, 4e édit., p. 571). Mais M. Claparède est plus darwiniste que M. Darwin, et, pour être conséquent, il est obligé d’affirmer qu’il n’y a pas deux espèces, végétales ou animales, qu’on puisse, par la sélection naturelle, faire remonter à une origine commune, si l’on ne peut en prouver autant pour tous les animaux et pour toutes les plantes.

Ma manière de voir n’implique pas une négation aussi complète de cette théorie ; car j’admets que l’homme est descendu d’une forme animale inférieure, mais j’avance des faits, ten-