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LIMITES DE LA SÉLECTION NATURELLE

cipe de la sélection naturelle et de la théorie générale de l’évolution, savoir, qu’aucun changement de forme ou de structure, aucun accroissement dans la dimension ou la complication d’un organe, aucun progrès dans la spécialisation ou dans la division du travail physiologique, ne peut se produire s’il ne concourt au bien de l’être ainsi modifié. M. Darwin lui-même a pris soin de nous pénétrer de cette idée, que la sélection naturelle ne peut pas produire la perfection absolue, mais seulement une perfection relative ; elle ne peut placer aucun être beaucoup en avant de ses semblables, mais seulement autant qu’il le faut pour lui permettre de leur survivre dans la lutte pour l’existence. Elle peut bien moins encore produire des modifications qui seraient nuisibles à l’individu ainsi affecté, et M. Darwin va jusqu’à répéter, à plusieurs reprises, qu’un seul cas de ce genre serait fatal à sa théorie. Si donc nous trouvons chez l’homme des caractères quelconques qui, autant que nous pouvons le prouver, ont dû lui être nuisibles lors de leur première apparition, il sera évident qu’ils n’ont pas pu être produits par la sélection naturelle. Il en serait de même du développement spécial d’un organe si ce développement était, ou simplement inutile, ou exagéré par rapport à son utilité. De semblables exemples prouveraient qu’une autre loi ou une autre force que la sélection naturelle a dû entrer en jeu. Mais, si nous pouvions apercevoir que ces modifications, bien qu’inutiles ou nuisibles à l’origine, sont devenues de la plus haute utilité beaucoup plus tard et sont maintenant essentielles à l’achèvement du