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DÉVELOPPEMENT DES RACES HUMAINES

ture, révolution sans analogue jusque-là dans les âges de l’histoire du monde, car il avait paru un être qui n’était plus nécessairement sujet aux variations de l’univers, un être qui était jusqu’à un certain point supérieur à la nature, puisqu’il savait guider et régler son action, et pouvait se tenir en harmonie avec elle, non par les changements de son corps, mais par les progrès de son esprit.

C’est donc ici que nous voyons la vraie grandeur et la supériorité de l’homme. En considérant ainsi ses attributs particuliers, nous pouvons admettre que ceux qui réclament pour lui un ordre, une classe, ou même un sous-règne à part, ont pour eux quelque apparence de raison. L’homme est réellement un être à part, puisqu’il n’est pas soumis aux grandes lois qui s’exercent d’une manière irrésistible sur tous les autres êtres organisés. Il y a plus : ayant surmonté ces influences pour lui-même, cette victoire lui permet d’exercer une action directrice sur d’autres existences que la sienne. Non-seulement il a échappé lui-même à la sélection naturelle, mais il peut dérober à la nature une partie de cette puissance qu’elle exerçait universellement avant qu’il fût au monde. Nous pouvons concevoir un temps où la terre ne produira plus que des plantes cultivées et des animaux domestiques, où la sélection de l’homme aura supplanté la sélection naturelle, et où les profondeurs de l’Océan seront le seul domaine dans lequel la nature pourra exercer ce pouvoir qui lui a appartenu pendant des séries de siècles.