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CRÉATION PAR LOI.

fréquentent les orchidées, enfoncent dans les nectaires leurs trompes en spirales, et fécondent la plante en transportant le pollen d’une fleur aux stigmates d’une autre. Il a en outre expliqué en détail le mécanisme de ce phénomène, et le duc d’Argyll reconnaît la sûreté de ses observations. Dans les espèces communes dans les îles Britanniques, telles que l’orchis pyramidalis, il n’est pas nécessaire qu’il y ait coïncidence parfaite dans les dimensions du nectaire et de la trompe de l’animal ; aussi un grand nombre d’insectes de diverses grandeurs servent à transporter le pollen, et à opérer la fécondation. Au contraire, pour l’angrœcum sesquipedale, il est nécessaire que la trompe pénètre jusqu’à une partie spéciale de la fleur, ce qui ne peut être accompli que par un grand papillon qui enfouit sa trompe jusqu’à sa base, et s’efforce d’absorber le nectar qui occupe le fond de ce long tube, avec une profondeur d’un ou deux pouces au plus. Considérons maintenant de quelle façon les choses ont dû se passer à l’époque où le nectaire n’avait que la moitié de sa longueur actuelle, soit six pouces environ, et où la fécondation s’opérait par une espèce de papillon qui apparaissait au moment de la floraison et possédait une trompe à peu près égale au nectaire. Parmi les millions de fleurs d’angrœcum produites chaque année, quelques-unes dépassaient la longueur moyenne, d’autres lui restaient inférieures ; pour celles-ci la fécondation était impossible, car le papillon s’emparait de tout leur nectar sans être obligé pour cela d’enfoncer sa trompe jusqu’à sa base même ; elle était au contraire facile pour