Page:Waldor - L’Écuyer Dauberon ou l’Oratoire de Bonsecours, Moutardier, 1832.djvu/32

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
14

tremblait ; celle du jeune homme tremblait encore plus… Tous deux restèrent long-temps à regarder, sans la lire, cette ligne qu’il venait d’écrire au milieu de ces deux vers des Horaces :


Je le vois bien, ma sœur, vous n’aimâtes jamais ;
On dira seulement : Il adorait Chimène !
Vous ne connaissez point ni l’amour ni ses traits.


Il régnait entre eux un muet embarras, une joie non avouée d’être ensemble, et une vague crainte de ne pouvoir se cacher assez bien tout ce qu’ils étaient déjà l’un pour l’autre… Absorbés dans une même pensée, ils semblaient étrangers à tout ce qui les entourait, et si un nuage s’était doucement élevé autour d’eux, on aurait pu les prendre pour ces esprits aériens qui, s’échappant d’un monde intellectuel, viennent s’égarer et se briser dans notre monde positif. Le son du cor, les aboiements des chiens les arrachèrent à ces premières voluptés de l’âme qui sont à l’amour ce qu’est la jeunesse à la vie ! une fois éteintes, rien ne les peut rendre. Alide courut à la fenêtre, le jeune