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désert qu’aucun souffle n’a ternie… Il se rappela vaguement l’enivrante volupté que ces deux mots, Je t’aime ! prononcés par elle, avaient répandue dans son âme ; il se rappela le premier baiser qu’en frissonnant il avait posé sur son front, ses muets transports, ses pures extases lorsqu’il entendait le bruit de ses pas, lorsqu’il retenait sur ses lèvres le bout de son écharpe, lorsque, agenouillé devant elle, il sentait sa main courir dans ses cheveux, et qu’il n’osait parler de peur que le son de sa voix ne troublât le bonheur presque religieux dont il jouissait à ses pieds… Son cœur battit avec force à ces souvenirs qu’il croyait effacés sans retour. Il eut horreur de lui ; et, jetant un regard sombre sur la courtisane, le mot démon s’échappa de sa bouche.

« Enfant, lui dit Gertrude, s’agenouillant à ses pieds ; enfant, qui ne sais pas oublier, et qui crains des larmes… Regarde-moi ! c’est moi qu’il faut aimer, et ne plus tromper… Je suis belle, je suis libre.

— Je le sais.