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colliberts.

tenait à Gilles de Retz, surnommé Barbe-Bleue, ce Barbe-Bleue dont vous avez lu l’effrayante histoire dans les contes de Perrault, et dont vous lirez, quand vous serez grands, l’histoire véritable, bien affreuse, bien épouvantable aussi, mais qui ne ressemble en rien au conte que l’on a fait pour vous, et qui, selon moi, me semble une lecture beaucoup plus effrayante qu’amusante. Barbe-Bleue avait donc un château à Tiffauges ; on croit que ce château fut bâti au temps de saint Louis dans le xiiie siècle.

Lorsque les Goths se furent alliés à une grande partie des Cambolectri, ils songèrent, dans le vie siècle, à se débarrasser de ceux des Cambolectri qui menaient encore au milieu d’eux la vie errante de leurs pères ; ils les chassèrent d’une partie de la Vendée appelée aujourd’hui le Bocage, les forcèrent à se replier dans les marais qui bordent l’Océan, et les emprisonnèrent ainsi entre la terre et les flots. Les malheureux Cambolectri comprirent alors qu’il n’y avait plus pour eux d’autre liberté, d’autre asile, d’autre patrie que la mer et ses vagues, moins redoutables à ces hommes non civilisés, que la vie d’esclavage qu’ils laissaient derrière eux.

On donna à ces pauvres exilés le nom de Colliberts, qui signifie Tête libre ; et, après les avoir chassés de leurs forêts, on leur laissa la liberté d’errer au bord des côtes et dans les marais. Il n’y avait là aucun gibier qui pût les aider à vivre ; quelques oiseaux de mer venaient seuls s’abattre sur les côtes, et leur chair était dure et mauvaise au goût ; la pêche devint leur unique moyen d’existence : ils faisaient sécher le poisson au soleil et s’en nourrissaient lorsque la pluie les empêchait de s’en procurer d’autres. Ils avaient bâti de nouvelles huttes, mais moins belles et moins commodes que celles qu’on les avait forcés d’abandonner ! Repoussés de tous, même de leurs compatriotes, leur