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espèce se trouvaient étendus sur le siège de la proue, et une large voile était pliée au mât.

— Oh ! le joli bateau ! s’écrièrent Pierre et Loubette, pourquoi n’y a-t-il personne à bord ?

— Montez-y, mes enfants, leur dit le curé en les prenant par la main.

Ils y sautèrent gaiement, aidèrent le vieillard à les suivre, et ils entrèrent tous trois dans la cabane ; elle était meublée à neuf… Mais ce qui fixa toute l’attention des deux jeunes gens, ce fut le même homme au manteau brun, que Pierre avait aperçu le premier jour de son installation chez le curé. L’étranger était assis ; il se leva, ôta son chapeau, et, regardant Pierre avec un sourire plein de bienveillance, il lui dit :

— Pierre, ne me reconnaissez-vous pas et ne vous rappelez-vous plus cet étranger que vous aidâtes si généreusement à sauver des eaux de la Sèvre, il y a bientôt dix ans ?

— Je sais le reste, Monsieur, je sais le reste, s’écria Pierre, en couvrant de baisers la main de l’inconnu : c’est vous qui êtes cette providence attachée à tous mes pas, c’est vous, Monsieur !… oh ! dites-le… dites que c’est vous ?

Pierre était hors de lui, il pressait le bon curé sur son cœur en répétant mille fois :

— Vous saviez tout, et vous me le cachiez !

Puis, des bras du curé, il passait dans ceux de son bienfaiteur. Loubette partageait sa joie et son bonheur… Les deux familles venaient d’entrer dans le bateau.

— Venez, mon père, disait Pierre, le serrant dans ses bras ; venez, ma mère ! voici notre bienfaiteur, vous le reconnaissez, n’est-ce pas ? et attirant son oncle vers l’étranger : Tenez, mon oncle, voilà celui à qui nous devons tout, c’est lui, c’est ce Monsieur… L’argent que je vous portai, l’instruction que j’ai reçue, ma nacelle, mes habits, ceux de