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les petits

ta mère ; tu porteras bonheur à ta famille. Comment t’appelles-tu ? — Je m’appelle Jean, du nom de mon grand-père, qui m’a tenu sur les fonts de baptême.

— Allons, Jean, retournons près de ta mère, et aies bon courage.

— Oh ! oui, Monsieur, j’en aurai.

Et Jean, qui sentait au fond de son âme un grand contentement de lui-même, releva la tête et suivit le curé, sans qu’un seul soupir s’échappât de sa petite poitrine, qui était cependant bien oppressée.

— Voilà Jean qui accepte votre proposition, dit le curé en rentrant dans la chaumière ; il restera avec vous ; il m’a promis de bien faire son devoir et de prouver par sa bonne conduite toute sa reconnaissance. Le frère de Jean se cramponna à sa mère et cacha sa figure toute rouge de joie sur ses genoux.

— Dieu te bénira, mon fils, dit la pauvre aveugle en cherchant avec sa main celle de son aîné ; grâce à lui tu ne vas plus manquer de rien, et je te saurai à l’abri de la misère. Hélas ! ajouta-t-elle, que ne puis-je en dire autant de ton frère, et de ta petite sœur !

— Donnez-moi Jeanne, s’écria Pierre en s’avançant vers elle, les yeux pleins de larmes, les joues rouges et les lèvres tremblantes, j’ai une cousine qui l’aimera et qui la soignera bien ; elle ne demeure qu’à une lieue d’ici, et je l’amènerai voir son frère trois ou quatre fois l’an.

— Es-tu sûr de ce que tu avances là, mon ami, dit le curé ; Loubette n’est pas sa maîtresse, et ton oncle et ta tante n’auraient qu’à ne pas vouloir prendre cette enfant chez eux.

— Oh ! que si, ils le voudront bien ! reprit Pierre en rougissant encore davantage, car il sentait que son bon cœur