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les petits

village où ce malheur était arrivé. Ce village était situé à plus de douze lieues de l’endroit où ces infortunés venaient implorer des secours.

Chacun des habitants de la chaumière où se trouvait le curé avait écouté la lecture de ce grand malheur, en donnant tous les signes de la plus vive compassion.

— Jésus mon Dieu ! disaient les femmes, que vont-ils faire, les pauvres gens ?

— Dieu en prendra soin, reprit le curé ; Dieu inspirera aux hommes qui n’ont pas subi de tels malheurs, le désir de venir au secours de leur misère ; ils penseront que nul d’entre eux n’est à l’abri d’une semblable calamité, et qu’il faut qu’ils fassent pour ces malheureux ce qu’ils voudraient que l’on fît pour eux en pareille circonstance.

— Entrez, entrez, ne restez pas à la porte, crièrent aussitôt le père et la mère de la nombreuse famille qui habitait cette chaumière, il y a place pour vous au feu et à table.

Le vieillard passa le premier, inclinant sa belle tête blanche, et bénissant ses hôtes ; la pauvre aveugle suivit, et les trois enfants se cachèrent à demi sous son tablier, tant ils étaient honteux de se trouver tout à coup en face d’un si grand nombre d’étrangers ; les deux petits garçons surtout paraissaient ne savoir où se mettre, lorsque la mère fut assise ; ils pouvaient avoir de huit à dix ans ; on voyait que leurs parents s’étaient privés de tout pour eux, car ils étaient gras et frais. La petite fille n’avait que cinq ans ; elle paraissait bien fatiguée, et avala avec une grande joie une jatte de lait qu’un des enfants de la fermière lui présenta ; c’était le meilleur moyen de la mettre à son aise ; on l’employa aussi avec ses frères, qui finirent peu à peu par regarder tout ce qui les entourait. Pierre avait pris la petite fille sur ses genoux ; il cherchait à la faire causer, mais il