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colliberts.

— Aide-moi, lui dit son père ; la pêche est plus abondante que je ne l’aurais cru.

— Est-ce pour la pêche que vous êtes resté, mon père ? dit Pierre en s’empressant à retirer les poissons et à les jeter dans le fond du bateau. Émeriau ne répondit pas à son fils. Le soleil se coucha, et la famille rentra dans la cabane. On se mit à table pour souper ; Pierre avait le cœur gros, il ne mangea presque pas.

— Qu’est-ce que cela signifie ? dit Émeriau en lui frappant sur l’épaule, l’appétit ne va pas, et l’on dirait que tu as la larme à l’œil : fi ! mon garçon, cela ne convient pas à un homme ; il faut rire, travailler et manger, je ne connais que cela !

— D’où vient, mon père, interrompit Pierre en s’enhardissant peu à peu, d’où vient que nous ne sommes pas partis ce matin comme de coutume pour aller voir mon oncle ?

— Il paraît que cela t’occupe bien, mon garçon, car voici la deuxième fois que tu me fais cette question.

— Je vois bien, reprit Pierre, qu’il y a quelque empêchement qu’on ne veut pas me dire.

— Et si cela était, interrompit son père, tu commettrais une faute en nous questionnant ; il me semble que tu dois savoir que nous avons plus d’expérience et plus de raison que toi.

— Oui, mon père, répondit Pierre, ce que vous faites est toujours bien fait. Si je me suis permis cette question, ajouta-t-il, c’est que j’espérais que je n’étais plus un enfant, et que vous aviez confiance en moi.

Une grosse larme brilla alors au bord d’une des paupières du bon petit jeune homme ; et comme il faisait de grands efforts pour qu’elle ne vînt pas à tomber, son père en eut