Page:Waldor - Heures de récréation, 1890.pdf/107

Cette page a été validée par deux contributeurs.
107
auguste.

n’ai pas de dispositions ; certes tu as été aussi bon maître que possible, mais c’est moi qui ne suis pas fait pour cela apparemment. »

M. Dorigny embrassa son fils avec un sentiment d’orgueil paternel bien justifié : il venait de reconnaître dans Auguste une âme noble et généreuse, sans petitesse, sans envie.

Les quinze jours s’écoulèrent ; Véronique partit ; elle pleura beaucoup en quittant son fils, sa gloire, son cher Delriau, et l’enfant eut bien de la peine à s’arracher de ses bras. Enfin la promesse bien des fois répétée de ramener Delriau passer, à la fin du printemps, un mois au château avec les enfants de M. Dorigny, rendit le courage à la bonne nourrice, et l’on se sépara.

L’hiver fut entièrement consacré au travail. M. Mauviel eut deux élèves au lieu d’un ; mais les progrès de Delriau dans les langues étaient presque nuls ; sa vive imagination l’emportait loin des Grecs et des Romains, ou, s’il les aimait ce n’était qu’en sculpture. Il passait deux heures avec M. Mauviel, et sept heures dans l’atelier de son maître : « Cet enfant ira loin, disait souvent David, il a du génie, » et il s’attachait à son élève et jouissait avec orgueil de ses rapides progrès.

Un jour Delriau rentra ivre de joie : il ne tenait plus à la terre ; il venait de créer une statue, un homme haut d’une coudée ; ce n’était plus du bois, c’était du plâtre.

« Ah mon Dieu ! s’écria Auguste, que je voudrais faire une statue. Papa, peut-être que je manierai mieux la terre glaise que le couteau ; car c’est avec de la terre glaise que tu travailles, n’est-ce pas, Delriau ? j’en ai vu dans ta chambre.

— Oui, reprit Delriau : lève-toi demain un peu avant le jour, je te montrerai comment je fais, tu verras. »