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auguste.

on marchait ; il frappa, Delriau ouvrit ; il était tout habillé, et tenait entre ses mains son couteau et un chien qui n’était encore que grossièrement ébauché. Il rougit en voyant Auguste, mais ses yeux brillèrent de plaisir, et il serra fortement la main que celui-ci lui tendait.

Les enfants se lient bien plus vite lorsqu’ils sont seuls, et qu’ils ne se croient pas l’objet de la curiosité ou de l’attention. En moins d’un quart d’heure, Auguste et Delriau avaient mis de côté tout cérémonial ; assis sur la même chaise et jasant sans interruption, ils oubliaient le déjeuner, chose pourtant fort importante, à leur âge surtout. Une porte de communication s’ouvrit, et Véronique entra ; elle embrassa les deux enfants, presque aussi tendrement l’un que l’autre, car une nourrice est une seconde mère : et elle leur rappela qu’il ne fallait pas faire attendre M. Dorigny, qu’elle venait de trouver découpant la fameuse galette.

À ces mots magiques, les deux enfants se culbutèrent sur l’escalier, plutôt qu’ils ne le descendirent.

On entoura gaiement la table, et la galette fut fêtée comme on devait s’y attendre, car elle était bonne ; elle disparut plus d’à moitié sous les jeunes dents qui la broyaient sans pitié.

M. Dorigny avait promis à ses enfants quinze jours de vacance ; et ces quinze jours commençaient à l’arrivée de la nourrice, et finissaient à son départ.

— Auguste donna à Delriau le Livre des petits Enfants, et reçut en échange de longues et douces leçons ; il eut tout le temps, et cela sans redouter les pensums, de s’exercer dans l’art de façonner avec un couteau un morceau de bois ; mais c’était en vain que l’enfant, élève de lui-même et devenu tout à coup maître, donnait à ses leçons toute la clarté possible, et s’y prenait avec une extrême patience de vingt façons différentes : Auguste maniait son couteau si