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Rien ne vibre-t-il donc en toi de maternel ?
Et les grands bruits confus, la symphonie austère,
Le long souffle qui sort de tes flancs frémissants,
Ne nous disent-ils rien et n’ont-ils point de sens ?
Nous vois-tu seulement ? sais-tu que sur la terre
Il est un être étrange auquel vivre et jouir
Ne suffiront jamais, qui veut aussi comprendre,
Dont lame a tressailli d’un immense désir,
Dont le cœur veut aimer, et qui cherche à te tendre
Ses deux bras, tout surpris de ne te point trouver ?
Cependant, ô Nature impassible et muette,
En se tournant vers toi le rêveur, le poète
Crut quelquefois sentir jusqu’à lui s’élever
Un accent de tendresse, une voix d’espérance,
Et l’homme confiant à l’homme a répété :
« Au fond de la nature est une providence ;
Espérons. » Depuis lors toute l’humanité
Passe ici-bas tranquille, oubliant sa misère,
Se couche vers le soir et s’endort au tombeau,
Comme un enfant auquel on a dit que sa mère
Reste la nuit penchée auprès de son berceau.
Si, secouant son rêve, un jour l’homme s’éveille,
Vers ses pas hésitants quelle main se tendra,
Et de l’immensité montant à son oreille,
Dans le tombeau profond quelle voix parlera ?
Te reconnaîtrons-nous, nature souriante
Des beaux jours de printemps, des parfums et des fleurs,
Ou bien es-tu vraiment la grande indifférente,
Étrangère à la joie, ignorante des pleurs,
Qui de la même main, nourrice mercenaire,
Nous berce tous, vivants ou morts, sur ses genoux ?
Lorsque nous sortirons du long sommeil de pierre,
Nous l’apprendrons enfin. — Mais en sortirons-nous ?

(Vers d’un Philosophe.)


LE LUXE


Il rentra vers le soir ; il tenait la parure
Qu’elle avait le matin demandée : à son bras