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Les bouquins vont voler dans l’air,
Car à leurs yeux, disant leurs âmes,
Les yeux des filles, presque femmes,
Ont répondu par un éclair.

Alors, par leurs bras forts et souples
Faits pour n’être jamais lassés,
Les beaux corps blancs sont enlacés.
Et la ronde tourne par couples.

Mais, bientôt, la plainte du vent
Apporte un cri lointain de haine.
La ronde chante à perdre haleine :
Fanfan la Tulipe, en avant !

Un bruit sourd de canon résonne.
Blafarde, la ronde aux abois
Chante : Nous n’irons plus au bois...
Dans l’air un glas funèbre sonne.

Les voilà perclus et tremblants.
On chante : Il était une vieille...
Adieu rire et bouche vermeille !
Les bébés ont des cheveux blancs.

Mais la ronde, quoique hagarde,
Le dos courbé, les membres las.
S’acharne... et parmi les hélas !
On chevrote : La tour prends garde !

Leurs fronts semblent vouloir dormir
Dans le bercement du manège,
Le ciel gris fait tomber la neige
Et je crois entendre gémir.

Leur paupière n’est point rouverte,
Et leur rigidité fait peur !
La terre, pleine de stupeur,
D’un linceul de mort s’est couverte !

Leurs habits tombent, et leurs chairs
Ont laissé leurs poitrines vides !
Plus rien de leurs lèvres livides !
Plus rien de mes bébés si chers !