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Nous pensions les mots doux que nous n’osions pas dire,
Nous nous taisions, gardant chacun notre secret…
O silence ! c’était l’heure troublante et chaude
Où le soleil frémit sur les rideaux croisés,
L’heure lourde où l’amour, dans l’air assoupi rôde,…
Une rose effeuillait ses parfums apaisés,

(L’Ame brillante.)

THAÏS

Elle traîne sa robe aux fleurs hiératiques
Le long des escaliers où les tigres mystiques
Veillent, marbres luisants, dans des vapeurs de nard.

L’ombre bleuit au loin les terrasses massives
Que traverse le chœur des esclaves lascives,
Sur la lyre pressant leurs doigts roses de fard.

Thaïs prend ses cheveux imprégnés d’aromates ;
Le flot libre bondit sur ses épaules mates
Et couvre d’un réseau fauve ses reins cambrés ;

Tout meurt ; les rythmes las des sistres et des harpes
S’éteignent doucement ; les soyeuses écharpes
Se confondent avec le granit des degrés.

En les bassins ternis, l’eau se tait, glauque et lourde,
Les paons sont dispersés ; mais une plainte sourde
Trouble parfois la paix du solennel décor…

C’est Thaïs qui gémit, brûlante et langoureuse.
Thaïs, qui tord ses bras dans la nuit amoureuse,
Et qui, pour y pleurer, tombe sur son lit d’or î

(L’Ame brûlante.)