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Qui ne blessent jamais et qui savent guérir !
Ces lettres qui sont gaies, mais pour cacher des larmes,
Dont l’écriture tremble au vent des souvenirs.

« Mon Dieu ! ne puis-je pas connaître ses pensées ?
N’aurais-je pas mieux fait de le suivre toujours ?
Nous n’avons plus de fils quand la vie est passée… »
Oh ! que sont tes amours auprès de cet amour ?

Qui te rendrait jamais une telle tendresse ?
Comme au fond d’un vieux livre on conserveune fleur,
Garde cette lointaine et si pure caresse,
Oh ! ne déchire pas les morceaux de ce cœur !

Tant d’amour ! Tant d’amour t’a bercé dès l’enfance…
On s’habitue si bien et si vite à cela…
Ces lettres, tu les lis avec indifférence :
Mais songe, songe à ceux qui n’en reçoivent pas !…

[Les Lèvres et le Secret.)

LE BONHEUR TRISTE

O bonheur, tu m’as fait un idéal vulgaire !
Je regrette le temps où j’étais moins heureux :
Ma chambre était plus claire avec moins de lumière,
Mon lit était de fer, mais on y dormait mieux.

C’est vrai, c’était le temps de ma mauvaise vie.
J’étais moins bon, plus orgueilleux, moins attaché,
Mes maîtresses d’alors n’étaient pas bien jolies,
Même elles me trompaient et sans trop se cacher.

Les volants épinglés de leurs robes mal faites,
Les rubans mal noués et salis me charmaient…
J’avais peur de voir fuir ces urnes imparfaites,
Tout l’imprévu du monde en leurs yeux frémissait…

Hélas ! ma bien-aimée est charmante et fidèle,
Pleine d’attentions, de tact et de douceur
Et n’a qu’un seul défaut, sa présence éternelle,
Et le fleuve d’amour qui coule de son cœur.

Ses yeux sont clairs et doux sans arrière-pensée,
Et sa robe la moule et ne fait pas de plis.