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VIEUX CONTE

FRAGMENT

Dans l’éparpillement soyeux des cheveux d’or
Et parmi les blancheurs des coussins toute blanche,
Ayant clos pour cent ans ses grands yeux de pervenche,
Souriant vaguement à son rêve, elle dort.

Sa tête de côté légèrement se penche.
Un vitrail entr’ouvert laisse voir le décor
Du parc, où les oiseaux ne chantent pas encor,
Car la Fée endormit chacun d’eux sur sa branche.

Au pied du lit sommeille un beau page blondin.
Elle dort, immobile en son vertugadin,
La jupe laissant voir un bout de sa babouche…

Toute rose, elle dort son sommeil ingénu,
Car le Prince Charmant n’est pas encor venu
Qui doit la réveiller d’un baiser sur la bouche.

(Les Musardises.)

LES NÉNUPHARS

L’étang dont le soleil chauffe la somnolence
Est fleuri, ce matin, de beaux nénuphars blancs ;
Les uns, sortis de l’eau, se dressent tout tremblants,
Et dans l’air parfumé leur tige se balance.

D’autres n’ont encor pu fièrement émerger :
Mais leur fleur vient sourire à la surface lisse.
On les voit remuer doucement et nager :
L’eau frissonnante affleure aux bords de leur calice.

D’autres, plus loin encor du moment de surgir
Au soleil, ont leur fleur entière recouverte…
On peut les voir, bercés d’un remous sur l’eau verte :
Ecrasés par son poids, ils semblent s’élargir.

Ainsi sont mes pensées dans leur floraison lente.
Il en est d’achevés, sans plus rien d’hésitant,