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Où qu’y sont terrés pour toujours
Sur ta douce lèvre endormie.

[Au pays du Berry.)

LE
BERGER

Dans les sentiers que l’eau ravine,
Sous l’ombre fraîche des verdiaux,
Lentement le berger chemine,
Suivi de son grand chien corniaud.

Il s’en va dans les terres vierges
Où, parmi genêts et chardons,
Très hauts et droits comme des cierges
D’église, croissent les brandons.

Sans rêve et sans amour, morose,
Il s’en va par les clairs matins,
S’en revient par les couchants rose s
Avec ses moutons blancs, chabins.

Un rai de soleil auréole
Son front, et les plantains grenus,
Les jacinthes et les fléoles
Fleurissent aux champs ses pieds nus.

Les blondes filles des domaines,
Les filles au torse onduleux,
Viennent puiser l’eau des fontaines
Et tournent vers lui leurs yeux bleus.

Pour lui, pour lui seul, la Nature,
Amoureuse de ses haillons,
Prodigue, change de parures,
Se vêt de fleurs et de rayons.

Le berger regarde l’espace,
Debout dans la plaine aux cent bruits,
Indifférent devant la Nuit
Qui tombe et la Beauté qui passe.

[Au Vent de Galerne.)