LA ROSE ET PIERROT
À Suzanne Reichemberg.
Sur la plus haute branche,
Au fond du Paradis,
Poussait la Rose blanche,
Blanche du temps jadis.
Rossignol un dimanche
Chantait au paradis :
Au cœur de la Rose,
Ah ! qu’il fait bon dormir !
C’était à la nuit close,
Pierrot passait par là ;
Il avait le teint rose
Et l’habit de gala.
Près de la fleur éclose
Tout son cœur se troubla.
Au cœur de la Rose,
Ah ! qu’il fait bon dormir !
Il grimpe à l’églantine,
Si haut qu’il put grimper ;
Meurtri par chaque épine,
Si fort qu’il dut pleurer.
Dessus la mousseline
Le sang vint à perler.
Au cœur de la Rose,
Ah ! qu’il fait bon dormir !
Tant qu’au bout de la branche
Il arrive au bonheur.
Dessus la Rose blanche
Mit son baiser vainqueur ;
Mais la fleur, en revanche,
But le sang de son cœur.
Au cœur de la Rose,
Ah ! qu’il fait bon dormir !