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Me promettre que je t’aurai,
Vers toi dont la gorge me touche,
Vers toi, vers ta mystique bouche
Où fleurit mon rêve espéré.

« Et quand même à ce doux baptême
Je devrais n’arriver jamais.
Pour ce crime que tu commets
Je ne te dis pas anathème,
Et toujours et toujours je t’aime
Comme au premier jour je t’aimais ! »

Et tandis qu’il monte et s’exalte,
L’abeille noire au dard de fiel,
La Mort, vient butiner le miel
De ses yeux qui s’éteignent… « Halle ! »
Il les rouvre. Un pic de basalte,
Nu, chauve ! Une cime en plein ciel I

Là-bas, en bas, bien loin, la terre
Semble un brouillard qui s’est enfui.
Mais ici, quel soleil a lui !
Ah ! son espoir s’en désaltère !
Ici, sur le pic solitaire,
C’est la Chimère, devant lui.

« Il faut que je te satisfasse.
Dit-elle, tu l’as mérité. »
Mais, ironique charité !
Tout à coup son corps fond, s’efface.
Disparu ! Plus rien qu’une face
Au sourire désenchanté !

Et lui-même alors il prend garde
Que son corps entier s’est perdu
Et que tout son individu
N’est plus qu’une face hagarde
De décapité qui regarde
Avec un regard éperdu.

Et de ces deux faces livides
Déjà les fuyantes couleurs
Se fanent ainsi que des fleurs
Au vent des ténèbres avides.