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Ah ! là-haut, c’est peut-être là
Que son espérance exila
Le but qui toujours recula !

Ah ! là-haut, c’est peut-être l’arche
Vers laquelle ce patriarche
Guidait son éternelle marche !

Quand le dimanche il défilait
Sous un portail son chapelet,
C’est là-haut que son cœur allait !

Là-haut, c’est la terre promise !
Là-haut, pour les gueux sans chemise
Le lit est fait, la table est mise !

Et sans doute ce vagabond
Va s’envoler là-haut d’un bond,
Et ce moment lui semble bon !

Eh bien ! non. Tordu comme un saule,
Ce prisonnier tient à sa geôle.
Il ne veut pas mourir, le drôle !

Il lutte, il hurle comme un fol.
Cambre ses reins, tourne son col,
Et de ses baisers mord le sol.

Il n’a point de céleste envie,
Et dans sa soif inassouvie
Il veut boire encore à la vie.

Sur ce lit de mort sans chevet
Il se rappelle qu’il avait
De bons moments quand il vivait,

Que dans son enfance première
Il dormait chez une fermière
Près de l’âtre de la chaumière,

Que plus tard dans les verts sentiers
Il a passé des jours entiers
À défleurir les églantiers,

Qu’au mois de mars, mois des pervenches,
Il a souvent pris par les hanches
De belles filles aux chairs blanches,