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du cœur, plein de tendresse pour la nature, de délicatesse en sa conception de la femme, et de douce mélancolie (1876, Les Poèmes de l’autour et de la mer).

Dans son Faust moderne, ayant mesuré « le vide et l’insuffisance des doctrines matérialistes », il traduit lui-même l’espèce de dépression morale et les réelles souffrances qu’entraînaient des théories pessimistes aussi peu faites pour lui… « Tiraillé entre son panthéisme mystique et sa recherche d’un Dieu personnel, il s’efforce de concilier ces tendances de manière à satisfaire à la fois son désir d’un entier repos de l’âme au sein de Dieu et le rêve d’une immortalité active consacrée au triomphe de la justice. »

Au tumulte des idées, nous dit-il, s’ajouta le conflit des sentiments, et de cette crise sortit l’Aurore.

De 1888 à 1895 enfin, il publia les Symboles, dont l'Épilogue, que nous reproduisons, représente l’aboutissant de sa pensée philosophique et religieuse. Après avoir comparé entre elles les diverses façons dont Dieu a été conçu à travers les âges, l’auteur finit par se dire que nulle foi religieuse ne doit être tout à fait fausse, car il serait trop cruel qu’on pût chercher de tout son cœur sans rien trouver, ni tout à fait vraie, car pas un être humain ne semble digne de posséder la vérité entière… « Dieu est trop loin de nous, et les faibles lueurs qui transparaissent à travers les voiles ’qui le cachent, sont changeantes, furtives et peut-être décevantes ; nul ne les voit toutes à la fois, et chacune d’elles ne peut que faire pressentir vaguement le foyer d’où elle rayonne. » Les plus profondes doctrines élaborées à travers les siècles ne sont donc que les images lointaines, les obscurs Symboles d’une sublime et inexprimable réalité. Ces symboles, il faut les aimer. L’auteur les groupe dans son livre, dont le titre est en même temps un acte de foi et un aveu d’ignorance, et il arrive à cette conclusion, où se résume son Épilogue : « Les plus hautes croyances, divisées sur tant de choses, s’unissent pour exiger impérieusement la pratique du bien. »

On sait que M. Maurice Bouchor a toujours montré un goût particulièrement vif pour la poésie populaire, qu’il essaye de restituer au peuple sous une forme nouvelle. Son Noël, un vrai petit chef-d’œuvre, essaye de ressusciter l’ancien Mystère. Les Poemes et Récits d’après de vieilles chansons de France sont également caractéristiques. Une autre tentative digne des plus grands éloges est faite par M. Maurice Bouchor pour hausser vers la beauté l’âme populaire : « Par des causeries, des lectures, il réunit autour de lui les ouvriers, écarte pour quelques instants les voiles suspendus sur leur horizon. Les chefs-d’œuvre de la littérature, parce que simples de sentiment et d’action, doivent d’abord être offerts aux auditeurs. Avec un soin infatigable, M. Bouchor annote les pièces de théâtre, les poèmes dont il