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« — Toi. — Jeté vois partout, mais comme un voyant blême.
Je t’adore… Et c’est pauvre : adorer ce qu’on aime !
Apparais, un poignard dans le cœur ! — Ce sera,
Tu sais bien, comme dans Inès de la Sierra…
— On frappe… oh ! c’est quelqu’un… Hélas ! oui, c’est un rat.

— « Je rêvasse… et toujours c’est Toi. Sur toute chose, Comme un esprit follet, ton souvenir se pose :
Ma solitude. — Toi ! — Mes hiboux à l’œil d’or :
Toi ! — Ma girouette folle : oh ! Toi !… — Que sais-je encor ?.
— Toi ! mes volets ouvrant les bras dans la tempête…
Une lointaine voix : c’est Ta chanson ! — c’est fête !…
Les rafales fouaillant Ton nom perdu — c’est bête —
C’est bête, mais c’est Toi ! Mon cœur au grand ouvert
Comme mes volets en pantenne,
Bat, tout affolé sous l’haleine
Des plus bizarres courants d’air.

« Tiens… une ombre portée, un instant, est venue
Dessiner ton profil sur la muraille nue,
Et j’ai tourné la tête… — Espoir ou souvenir —
Ma Sœur Anne, à ta tour, voyez-vous pas venir ?…

— Rien ! — je vois… je vois, dans ma froide chambrette,
Mon lit capitonné de satin de brouette ;
Et mon chien qui dort dessus. — Pauvre animal ! —
… Et je ris… parce que ça me fait un peu mal.

« J’ai pris, pour t’appeler, ma vielle et ma lyre,
Mon cœur fait de l’esprit — le sot — pour se leurrer…
Viens pleurer, si mes vers ont pu te faire rire ;
Viens rire, s’ils t’ont fait pleurer…

« Ce sera drôle… Viens jouer à la misère.
D’après nature : — Un cœur avec une chaumière. —
… Il pleut dans mon foyer, il pleut dans mon cœur feu.
Viens ! Ma chandelle est morte, et je n’ai point de feu. »

Sa lampe se mourait. Il ouvrait la fenêtre.
Le soleil se levait. Il regarda sa lettre,
Rit et la déchira… Les petits morceaux blancs,