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Et, dans un rapide galop,
Vous voyez tournoyer la ronde
Du peuple noblement immonde
Que nous légua le grand Callot.

Ainsi, dans ma noire tristesse,
Je revois, joyeux et charmants,
Passer tous les enivrements
De qui mon âme fut l’hôtesse :

Les poèmes inachevés,
Les chansons aux rimes hautaines,
Les haltes au bord des fontaines,
Les chants et les bonheurs rêvés ;

Tout prend une voix et m’invite
A recommencer le chemin,
Tout me paraît tendre la main…
Mais la vision passe vite.

Et par les temps mauvais ou bons,
Je reprends, sans nulle pensée,
Ma route, la tête baissée,
Pareil à mes chers vagabonds !


LES JOUETS


Pour l’avoir rencontrée un matin, je l’aimai,
Au temps où tout nous dit les gaîtés naturelles,
Quand les arbres sont verts, lorsque les tourterelles
Gémissent de tendresse au clair soleil de mai.

Nos âmes échangeaient de longs baisers entre elles,
Tout riait près de nous, et, dans l’air parfumé,
On entendait des bruits d’amoureuses querelles.
Mon cœur, alors ouvert, depuis s’est refermé.

Et ne me demandez jamais pour quelle cause
Vers un autre côté la fille svelte et rose
A détourné ses yeux doux comme les bluets ;

Car, pour ne pas laisser leurs mains inoccupées,
Les enfants, sans pitié, brisent leurs vieux jouets
Et retirent le son du ventre des poupées !