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aux parchemins pourpres, on en fabriquait du temps même de Pline. Vers la fin du ive siècle, les moines s’occupèrent de cet art, qui fut pendant longtemps cultivé avec succès, comme l’attestent plusieurs manuscrits précieux où brillent les reflets les plus éclatants du rouge, du bleu et du violet. Vers la fin du ixe siècle, le secret de cette préparation paraît s’être en partie perdu. Les parchemins pourprés n’ont plus qu’une teinte obscure et rembrunie. Les vélins[1] teints en pourpre étaient en général destinés à recevoir des lettres d’or ou d’argent, et devaient avoir un très-grand prix. On sait d’ailleurs que le parchemin était fort rare, même à son état naturel. De là cette funeste habitude de racler les anciens titres pour en écrire de nouveaux. Il paraît que le moyen âge ne fit en cela qu’imiter l’exemple des Romains. On peut quelquefois sans doute arriver à découvrir quelques vestiges de l’écriture primitive, mais ce déchiffrement offre presque toujours de grandes difficultés.

Quoique l’invention du papier de chiffe paraisse remonter au xiiie siècle, il ne fut d’un usage ordinaire que dans le courant du siècle suivant. Le plus ancien titre sur papier de chiffe que Mabillon ait rencontré, est une lettre de Joinville à Louis X. Ce papier ne doit pas être confondu avec le papier de coton (charta bombicina, bombacina, cuttunea ou Damascena). Celui-ci est plus épais, plus lisse, et laisse ordinairement paraître vers la tranche des parcelles de coton. Cette substance se voit même à son état naturel et comme en flocons dans des registres qui ont souffert de l’humidité. Le papier de coton était certainement en usage chez les Orientaux dès le ixe siècle, et les auteurs du Nouveau Traité de Diplomatique ne paraissent pas éloignés de croire qu’on l’employait déjà cinq cents ans auparavant. Du reste, il n’eut jamais autant de cours chez les Latins que chez les Grecs. Toutefois, les relations commerciales l’avaient introduit à Venise, à Naples et en Sicile. Montfaucon parle de plusieurs manuscrits en papier de coton, qui remontent au xe siècle. Selon le même auteur, les chartes les plus anciennes qui aient été écrites sur cette substance, sont du commencement du xiie siècle. Il est inutile de faire remarquer que, malgré la découverte du papier de coton et du papier de chiffe, le parchemin continua d’être en usage pour la transcription des actes qui avaient quelque importance et dont on voulait assurer plus longtemps la conservation. De nos jours encore on emploie le parchemin pour les expéditions de quelques contrats de mariage et d’un petit nombre de contrats de vente.

  1. On emploie souvent comme synonymes les mots vélin et parchemin, parce que ces deux substances servaient au même usage ; mais on sait que le vélin proprement dit se fabrique avec la peau de veau, et le parchemin avec la peau de mouton.