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ACTE DEUXIÈME

D’où, par la force de l’amour,
Ma mère, en expirant, m’arracha pour un jour. —
Là, je t’offre un abri, c’est là qu’est mon domaine,
Là je pourrai t’aimer, sans crime et sans remord ; —
Veux-tu m’y suivre, Yseult, veux-tu que je t’y mène,
En te liant pour jamais à mon sort ! —
Réponds un mot, ma reine.

YSEULT.

Lorsque tu vins, jadis, me prendre par la main,
Pour me conduire ici ; n’ai-je pas dû te suivre ? —
Ordonne maintenant, montre-moi le chemin,
Où son Tristan la mène, Yseult est prête à vivre.
Au bien-aimé mon cœur s’abandonne et se livre ;
Je t’ai donné mon amour et ma foi,
Ma place est près de toi !

Tristan se tourne lentement vers Yseult et l’embrasse sur le front.


MÉLOT,
bondissant de rage.

L’infâme ! — à mort ! — Punis la perfidie,
Ô mon maître, ô mon roi !

(Il tire son épée.)


TRISTAN,
le fer en main se tourne vivement vers Mélot.

Allons ! qui veut risquer sa vie ? —

Il regarde fixement Mélot.

Voilà l’ami, voilà le compagnon loyal,
Voilà celui qui m’a tendu sa main fidèle,
Celui, qui stimulant mon zèle,
M’inspira le projet fatal,
D’aller te chercher en Irlande,
Pour te jeter à mon oncle, en offrande ! —
Tes yeux, Yseult, l’ont ébloui ;